Uncategorized

Responsabilité des dirigeants : conditions de l’action ut singuli

Lorsque le dirigeant d’une société cause un préjudice à celle-ci, il engage sa responsabilité civile envers la société. Mais, puisqu’il est peu probable que le dirigeant agisse ès qualité contre lui-même, la loi autorise les associés à agir contre le dirigeant pour le compte de la société : c’est l’action ut singuli (Code de commerce, art. L. 223-22 pour les SARL, art. L. 225-252 pour les SA). Cette action est distincte de celle que les associés peuvent engager contre les dirigeants à raison d’un préjudice personnel, distinct de celui subi du fait de leur qualité d’associé.

La jurisprudence avait, jusqu’à présent, jugé que l’action ut singuli était subsidiaire et ne pouvait être engagée qu’en cas de carence des représentants légaux, soit qu’ils n’aient pas agi du tout (Com. 27 mai 2021 n° 19-17.568), soit qu’ils aient agi de manière manifestement insuffisante pour obtenir réparation du préjudice subi par la société (Crim. 16 décembre 2009 n° 08-88.305).

Ce principe de subsidiarité vient d’être abandonné par la Cour de cassation.

Les associés avaient engagé la responsabilité du gérant d’une SARL sur le fondement de l’action ut singuli. La Cour d’appel, constatant que la responsabilité du gérant avait été engagée par la société elle-même, avait déclaré cette action irrecevable, « l’action ut singuli étant traditionnellement considérée comme une action subsidiaire ».

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel :

Vu les articles 31 du code de procédure civile et L. 223-22, alinéa 3, du code de commerce :

8. Selon le premier de ces textes, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé.

9. Selon le second, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat, intenter l’action sociale en responsabilité contre les gérants.

10. Il en résulte que les associés sont investis d’un droit propre d’agir en réparation du préjudice subi par la société, lequel n’est pas affecté par l’exercice concomitant de son action par la société.

En conséquence, les associés étaient recevables à agir contre les dirigeants pour le compte de la société, quand bien même la société aurait elle-même déjà agi contre les dirigeants.

Com. 7 mai 2025 n° 23-15.931

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *