Compte courant d’associé débiteur : gare à la procédure collective
Lorsqu’une société est placée en procédure collective (sauvegarde, redressement, liquidation judiciaire), cette procédure peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes (notamment les dirigeants) en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur (article L. 621-2 du Code de commerce), ce qui permettra de saisir les biens de la personne concernée pour payer les créanciers de la société. La confusion de patrimoine se caractérise généralement par des relations financières anormales.
L’associé gérant d’une société avait procédé, à son profit, à des retraits d’espèces et virements non justifiés depuis le compte bancaire de la société. Celle-ci est ultérieurement placée en liquidation judiciaire. Le liquidateur demande l’extension de la procédure collective au gérant. La Cour d’appel, retenant une interprétation très littérale de la notion de confusion, avait rejeté cette demande au motif que les prélèvements opérés par le dirigeant avaient donné lieu à une inscription au débit de son compte courant d’associé, ce qui excluait toute confusion de patrimoine.
La Cour de cassation (Com. 13 septembre 2023 n° 21-21.693) censure l’arrêt d’appel : la confusion de patrimoine résulte de relations financières anormales, et l’inscription des prélèvements au débit du compte courant n’est pas de nature à en exclure l’anormalité.
En se déterminant ainsi, alors que l’inscription au compte courant d’associé de M. [B] des virements et retraits d’espèces qu’il avait opérés à son profit sur les comptes de la société n’était, en l’absence de toute caractérisation d’une contrepartie les justifiant, pas de nature à en exclure l’anormalité, la cour d’appel, qui s’est fondée sur des motifs impropres à établir l’absence de relations financières anormales constitutives d’une confusion des patrimoines, n’a pas donné de base légale à sa décision.
Rappelons par ailleurs que :
- le découvert en compte courant constitue une convention interdite dans les sociétés de capitaux (article L. 223-21 du Code de commerce pour les SARL, L. 225-43 pour les SA), le contrat étant nul ;
- le prélèvement de liquidités sur le compte de la société par un dirigeant peut constituer l’infraction pénale d’abus de biens sociaux (article L. 242-6 du Code de commerce).