Droit des sociétésVeille juridique

Cession de titres à un prix déterminable et office du juge

Si l’article 1591 du Code civil dispose que « le prix de la vente doit être déterminé« , il est de jurisprudence constante que le prix peut être simplement déterminable. Tel est le cas lorsque le prix est lié à la survenance d’un évènement futur et ne dépendant pas de la volonté d’une des parties ou d’un accord ultérieur entre elles (Com. 7 avril 2009). Mais si le prix n’est que déterminable, il convient de définir avec précision la méthode par laquelle il sera finalement calculé. A défaut, le juge ne peut en aucun cas déterminer le prix lui-même, et la vente encourt la nullité (relative).

La stipulation d’un prix déterminable est chose courante en matière de sociétés. Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, le contentieux portait sur le versement du complément du prix de vente de la totalité des actions d’une société. Le contrat stipulait :

« le prix sera susceptible d’être augmenté si les actions de la société 1855 [filiale de la société cédée, NDLR] deviennent liquides soit par leur admission aux négociations à la cote d’un marché réglementé, soit par leur cession »

« le complément de prix sera alors égal à 220 000 francs si la valorisation de 100 % du capital est égale à 100 000 000 de francs, étant entendu que si cette valorisation était supérieure ou inférieure à cette valeur de référence de 100 000 000 de francs, le montant du complément de prix sera ajusté proportionnellement »

Pour condamner le vendeur au paiement du complément de prix, les juges du fond avaient arrêté son montant par référence à « la cotation moyenne de l’action de la société 1855 sur 30 jours suivant la première cotation en continu sur le marché Alternext« . Considérant que les juges du fond avaient, non pas procédé à une interprétation de la volonté des parties, mais procédé à une fixation judiciaire du prix (prohibée), le vendeur s’est pourvu en cassation.

Suivant cet argument, la Cour de cassation casse l’arrêt pour défaut de base légale :

En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la prise en compte de la valorisation des titres de la société 1855 sur une période de trente jours suivant le 4 avril 2011, date de leur première cotation en continu sur le marché Euronext, pour déterminer le montant du complément de prix, résultait de la commune intention des parties, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

Com. 13 mars 2024 n° 22-15.309

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