Responsabilité pénale : identification du dirigeant
Il ressort de l’article 121-2 du Code Pénal que « les personnes morales (…) sont responsables pénalement (…) des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. » Il est donc nécessaire, pour engager la responsabilité pénale d’une société, de caractériser 1° l’existence d’une infraction, mais aussi 2° le fait que l’infraction ait été commise par un « organe » ou un « représentant » de la société. Le représentant peut être un mandataire légal (président, gérant…), mais également une personne (salarié par exemple) disposant d’une délégation de pouvoirs répondant aux conditions fixées par la jurisprudence
Dans une affaire de travail dissimulé concernant une compagnie aérienne dont le siège est situé à l’étranger, la chambre criminelle de Cour de cassation apporte une précision importante sur le second point.
Condamnée par la Cour d’appel, la société contestait que l’infraction ait été commise par un organe ou un représentant. Or il ressort de l’exposé des faits que la société visée avait fait obstacle à l’identification de ses représentants, en refusant toute coopération avec les services enquêteurs. Ce qui revenait, au final, à se prévaloir de sa propre obstruction, qui aurait empêché l’identification de son représentant.
La Cour rejette le pourvoi.
12. Pour identifier l’organe ou le représentant ayant agi pour le compte de la société prévenue dont les actes sont de nature à engager la responsabilité pénale de celle-ci, l’arrêt attaqué énonce notamment que, dans l’arrêt rendu le 22 mai 2017 par la cour d’appel de Paris, statuant dans une autre formation, à l’égard de la même société prévenue, il est mentionné que M. [E] [M] représentait en 2009 l’entreprise qu’il dirige sans avoir consenti de délégation de pouvoirs.
13. Les juges relèvent que l’intéressé a refusé d’être entendu, n’a pas répondu aux convocations d’enquête et s’est abstenu de comparaître devant la cour.
14. Ils observent que cette attitude est une constante de la société qui se soustrait à l’identification de son représentant légal.
15. Ils en déduisent la volonté délibérée de la société [5] d’empêcher l’identification de son représentant en rendant occulte le véritable décideur, ce qui caractérise la fraude.
16. Ils concluent que la responsabilité pénale de la personne morale est suffisamment recherchée, malgré les manœuvres précitées de soustraction, qui font obstacle à ce que la société [5] invoque sa propre turpitude pour échapper aux poursuites.
17. En se déterminant par ces seuls motifs, desquels il résulte que M. [M], dirigeant de la société [5], qui n’a pas allégué avoir consenti une délégation de pouvoirs, avait la qualité d’organe ou de représentant de la personne morale ayant agi pour son compte, la cour d’appel, qui s’est déterminée sur la base d’éléments de preuve versés au débat qu’elle a souverainement appréciés, a justifié sa décision.