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Société civile : le retrait accepté fait obstacle à la vente des parts

L’associé qui souhaite sortir d’une société civile peut, soit céder ses titres à un associé ou à un tiers (la cession étant soumise à l’agrément des autres associés, art. 1861 et s. du Code civil), soit faire valoir son droit de retrait (art. 1869 du même code). Le retrait est exercé, soit amiablement (dans les conditions fixées par les statuts ou avec l’accord de tous les associés), soit judiciairement pour justes motifs. L’articulation entre la cession et le retrait a donné lieu à une jurisprudence intéressante de la Cour de cassation.

L’associé (nommons-le M. A) d’une société civile souhaitait s’en retirer. L’assemblée générale avait accepté le principe du retrait. La société n’ayant pas payé le prix fixé par expert, M. A avait notifié son intention de céder ses parts à un tiers (M. B) ; les associés avaient refusé leur agrément. Six mois plus tard, prenant acte de ce que la société n’avait pas racheté les parts malgré le refus d’agrément, M. A cédait ses parts à M. B.

La société avait alors assigné cédant et cessionnaire en annulation de la cession. Le tribunal avait rejeté cette demande au motif que M. A n’ayant jamais été remboursé de ses parts, il avait conservé sa qualité d’associé ; en conséquence, il restait libre de céder ses parts si, l’agrément refusé, aucune offre d’achat ne lui avait été présenté (art. 1862 et 1863 du Code civil).

La Cour d’appel adopte le raisonnement inverse, et la Cour de cassation valide cette interprétation.

La Cour retient que M. A s’était engagé dans une procédure de retrait avec rachat de ses parts par la société. Tant que l’échec de ce rachat n’était pas dûment constaté (et, souligne la Cour d’appel, il incombait à M. A d’assigner la société en cession forcée), M. A ne pouvait s’engager dans une opération de cession à un tiers. En conséquence, la cession des parts en méconnaissance de la procédure de retrait en cours, devait être annulée.

Si l’espèce concerne le retrait d’une société civile, le raisonnement peut sans doute être appliqué à d’autres mécanismes de rachat des titres par la société, notamment la reprise d’apport de l’associé d’une société à capital variable (art. L. 231-1 du Code de commerce) ou la mise en œuvre d’une clause d’exclusion.

Civ. 3e, 25 mai 2023, n° 22-17.246

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