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Responsabilité des associés du fait de la révocation du dirigeant

La révocation irrégulière d’un dirigeant peut justifier que la société soit condamnée à l’indemniser ; ainsi la révocation intervenue dans des conditions brutales ou vexatoires, ou l’absence de justes motifs lorsque la loi en fait une condition de la révocation (gérant de SARL notamment). Mais dans certaines circonstances, les associés peuvent engager leur responsabilité personnelle, ainsi que le rappelle la Cour d’appel d’Angers dans un arrêt du 17 janvier 2023.

Dans l’affaire soumise à la Cour, le gérant d’une SARL avait été révoqué par l’assemblée générale, qui lui reprochait diverses fautes de gestion. Le gérant démis contestait cette révocation, d’une part en l’absence de justes motifs, d’autre part en raison de son caractère vexatoire. Il sollicitait non seulement la condamnation de la société au paiement d’une indemnité, mais également la condamnation in solidum des associés majoritaires.

La Cour d’appel lui donne raison.

Sur le juste motif de révocation, elle juge que les griefs avancés à l’appui de la révocation ne sont pas prouvés, ce qui justifie l’allocation de dommages-intérêts sur le fondement de l’article L. 223-25 du Code de commerce.

Mais surtout la Cour retient que les circonstances de la révocation dénotent une intention de nuire des associés majoritaires, qui engagent donc leur responsabilité personnelle sur le fondement de l’ancien article 1382 du Code civil (désormais article 1240).

Selon l’arrêt, le comportement des associés majoritaires (qui accusaient notamment le gérant évincé d’avoir exercé sur eux une violence morale, d’abus de faiblesse et de détournement) caractérise « une faute individuelle insusceptible d’être rattachée à l’expression de la volonté sociale ».

En conséquence, la Cour condamne les associés, in solidum avec la société, à indemniser le gérant démis.

La décision est conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation (notamment : Com. 13 mars 2001 n° 98-16.197 : « une décision inspirée par une intention vexatoire et contraire à l’intérêt social caractérise de la part de ses auteurs une volonté de nuire constitutive d’une faute »)

CA Angers 17 janvier 2023 n° 19/02320

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