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Direction d’une SAS : un acte extra-statutaire ne peut déroger aux statuts

Illustration de la liberté dont bénéficient les associés de SAS, l’article L. 227-5 du Code de commerce dispose que « les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ». Aussi, les conditions de nomination, de rémunération et de révocation des dirigeants (président, directeur général etc.) doivent-elles être prévues dans les statuts, qui s’imposent aux associés et aux dirigeants. La Cour de cassation vient de préciser que, si des actes extra-statutaires peuvent compléter les statuts, ils ne peuvent y déroger.

Une personne avait été désignée directeur général d’une SAS ; l’assemblée générale qui le nommait DG renvoyait à une « lettre-accord portant convention de direction », qui elle-même prévoyait notamment le versement d’une indemnité en cas de révocation. Or, les statuts de la société stipulaient que la cessation des fonctions de directeur général ne donnait droit à aucune indemnité de quelque nature que ce soit. Le DG ayant été révoqué, il sollicitait le versement de l’indemnité prévue par la lettre-accord, ce à quoi la société s’opposait sur le fondement des statuts.

La Cour d’appel (Paris, 18 février 2021 n° 20/00654) avait rejeté la demande du DG révoqué, la lettre-accord ne pouvant déroger à la disposition statutaires claire prévoyant la révocation ad nutum et sans indemnité du DG, et n’emportant pas modification des statuts.

Dans un arrêt du 12 octobre 2022 publié au Bulletin, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel : « il résulte de la combinaison des articles L. 227-1 et L. 227-5 du Code de commerce que les statuts de la SAS fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée, notamment les modalités de révocation de son directeur général. Si les actes extra-statutaires peuvent compléter ces statuts, ils ne peuvent y déroger ».

En conséquence, la lettre-accord ne pouvait valablement déroger aux dispositions statutaires, et le DG révoqué ne pouvait solliciter le versement de l’indemnité (alors même que la décision d’assemblée générale qui le disait renvoyait à cette lettre).

La portée de cet arrêt dépasse sans aucun doute la seule question des modalités de direction de la SAS, a fortiori des conditions de révocation du DG. En rappelant que les actes extra-statutaires ne peuvent déroger aux statuts, la Cour de cassation vise l’ensemble des engagements pris par les associés et relatifs au fonctionnement de la société, notamment ceux figurant dans un pacte d’associés. Aussi faut-il se montrer particulièrement vigilant quant à la cohérence des actes statutaires et extra-statutaires.

Cass. Com., 12 octobre 2022 n° 21-15.382

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